12 - 12
2010
Cet article est le premier d’une série de trois. Le premier s’attarde sur les définition de protéines, acides aminés, peptides. Le second traitera des hypothèses les plus convaincantes concernant l’origine des acides aminés et de la vie. Le troisième discutera des désagréments supposés d’une surconsommation de protéine.
Si vous prenez des compléments protéinés depuis longtemps, vous pensez peut-être savoir ce qu’est une protéine, un acide aminé ou ces mêmes acides aminés liés, c’est à dire des peptides. Seulement, il y a parfois des évidences qu’il faut savoir rappeler de temps à autres. Disons d’abord que d’un point de vue étymologique, une protéine vient du grec ancien prôtos, qui signifie premier, essentiel; c’est dire son importance !
Les protéines constituent dans la majorité des cas, la plus grande part du poids secs des organismes à plus de 50%. Les protéines forment une structure primaire déterminée par un ordre précis où s’enchaînent les acides aminés liés en peptides, cet ordre étant codé par le génome. Sur le plan historique, les protéines ont été découvertes par un chimiste hollandais du nom de Gerhard Muller au XIXème siècle.
Définition d’une protéine
Une protéine se définit simplement comme une molécule complexe composée d’une ou de plusieurs chaînes d’acides aminés regroupés en peptides, eux-mêmes liés par des liaisons peptidiques. On parle alors de biopolymère pour les peptides et les protéines. A l’opposé, les acides aminés sont des monomères. Généralement, on part d’un minimum de 100 acides aminés (c’est très peu) pour parler d’une protéine. Concernant des ensembles plus petits d’acides aminés on parlera naturellement de peptides ou de polypeptides. Les protéines sont généralement formées par plusieurs chaines polypeptidiques. Les acides aminés sont quant à eux, composés de groupes d’atomes où l’on retrouve majoritairement le carbone (50%), l’hydrogène, l’oxygène, l’azote et parfois le soufre pour certains d’entre eux.
Évidemment, les protéines sont des composants essentiels à la vie des cellules, nous dirons surtout que les acides aminés sont la vie elle-même comme nous le verrons dans un prochain article concernant l’origine de la vie et le rôle des acides aminés dans l’apparition du vivant. Les protéines ont un rôle structurel et d’entretien des tissus. Elles forment nos cellules, nos muscles et les organes qui les composent. Elles ont aussi un rôle important de catalyseur puisque les enzymes sont faites de protéines. Elles jouent un rôle capital au niveau de l’ADN et de l’expression des gènes. Enfin, elles peuvent jouer un rôle énergétique comme substrat lorsque le glycogène musculaire s’épuise.
A vrai dire, la majorité des fonctions cellulaires (et extracellulaires pour les enzymes, les protéines de transport, de signalisation ou motrices) sont assurés par des protéines. Sans protéine ou acides aminés, la vie n’existerait pas. Les protéines sont présentes chez tous les êtres vivants; on estime leur nombre à environ 30000 chez l’être humain mais on a pu en décrire seulement 2%.
Le centre de commande des protéines: les gènes
Dans le corps humain (ou dans celui de n’importe quel animal), les protéines sont assemblées à partir des acides aminés selon les informations données par les gènes. L’assemblage d’une protéine se fait acide aminé par acide aminé en fonction des ordres génétiques et des acides aminés présents pour les faire. En prenant l’exemple de la reconstruction des fibres musculaires après exercice, nous dirons que pour procéder à cette réparation, les acides aminés nécessaires sont puisés dans les protéines données par l’alimentation et décomposés en acides aminés. Les fibres sont alors réparées et les protéines musculaires sont refaites (le glucose et l’ATP sont utilisés comme énergie pour faire fonctionner le processus). On part des protéines alimentaires, décomposées en acides aminés puis recomposées en protéines musculaires.
Pour en revenir au codage des protéines par les gènes, disons que les milliers de protéines différentes assemblées constituent en quelques sortes la carte d’identité unique des individus. Ainsi, selon un assemblage particulier, telle personne sera plus ou moins grande, aura les cheveux bruns et pas blond, sera très musclé ou non. Les gènes commandent en quelques sortes les caractéristiques précises et uniques des individus alors que les protéines (et les milliers de combinaisons d’acides aminés possibles) leurs servent d’outils de codage et de synthèse. A partir de l’ADN, un brin d’ARN est synthétisé par transcription puis il y aura une traduction de cet ARN en acides aminés qui formeront ensuite des protéines.
Les protéines dans l’alimentation
A partir de la nourriture animale ou végétale que nous mangeons, les protéines sont décomposées pendant la digestion, en commençant par l’estomac. Les protéines sont hydrolysées (décomposition avec rupture des liaisons peptidiques entre les acides aminés) en polypeptides pour fournir les acides aminés dont le corps aura besoin. La majeure partie de cette digestion et l’absorption des acides aminés auront lieu dans l’intestin. Notons qu’une protéine ou un peptide est stable, une décomposition spontanée en acides aminés n’est pas possible sans l’intervention des enzymes ou d’un processus chimique.
Certaines protéines vendues dans le commerce sous forme de complément alimentaire sont hydrolysées (totalement ou partiellement) et permettent une assimilation facilitée. L’inverse de l’hydrolyse, l’estérification, est souvent utilisée dans l’industrie pour renforcer la stabilité de certaines molécules mais n’intéresse pas les protéines. Dans ce cas, l’utilité d’un tel processus est nul bien évidemment.
Classement sommaire des protéines
Les protéines sont tellement nombreuses et leur rôle dans l’organisme est tellement varié qu’on les classe en différentes catégories. Suivant leur composition chimique, on classera les protéines en deux groupes: les holoprotéines et les hétéroprotéines.
– Les holoprotéines (comme le suggère le préfixe) sont les protéines composés exclusivement d’acides aminés. Elles sont divisées en histones, protamines, gluténines, albumine, prolamines, globulines et scléroprotéines suivant leur spécificités (importance de certains acides aminés…).
– Les hétéroprotéines sont composés d’acides aminés et d’une part non protéique, appelé le groupement prosthétique. Ce groupe est important car il détermine la fonction de cette protéine. On les divise à nouveau en nucléoprotéines, lipoprotéines (protéines liées avec des phospholipides, cholestérol ou acides gras neutres), glycoprotéines, hémoprotéines, flavoprotéines qui sont liées au FAD (Flavine Adénine Dinucléotide) et métalloprotéines (avec atome(s) de fer, de zinc, de calcium, de molybdène ou de cuivre).
Ici, nous constatons que les protéines peuvent être liées à d’autres composants et former par exemple, les phosphoprotéines, présentes par exemple dans le jaune d’œuf et la caséine. On retrouve aussi les nucléoprotéines, association de protéines plus ou moins simples avec des acides nucléiques, formant ce que l’on appelle des groupement prosthétiques. Par exemple, les nucléines sont constituées d’acides nucléiques avec des histones ou des protamines.
On retrouve également les chromoprotéines, protéines où l’on retrouve du fer, du cuivre ou un tout autre métal. Ce sont par exemple l’hémoglobine chez les vertébrés ou l’hémocyanine chez les crustacés ou les mollusques. Comme vous le savez, ils transportent l’oxygène. On parle alors de pigments respiratoires.
Suivant le rôle biologique des protéines dans l’organisme, on détermine ensuite deux grandes classes de protéines, les fibreuses et les globulaires.
– Les protéines fibreuses font partie des tissus et des éléments structurant du corps comme les muscles, la peau, les os, les composants cellulaires ou leurs membranes. Leur rôle est d’assurer une fonction structurelle par la construction de structures simples et répétées (comme le collagène, l’élastine et la kératine). Elles sont composés de chaines de polypeptides liées autour d’un axe, ce qui permet la formation des fibres.
– Les protéines globulaires ont un rôle important à plusieurs niveaux du métabolisme, elles remplissent d’autres fonctions. Dans ce groupe, on compte les enzymes dont le rôle est primordial au maintien de la vie de l’organisme. On compte aussi les hormones dans le groupe des protéines globulaires (comme l’insuline), on parle généralement d’hormones peptidiques. Enfin, les protéines motrices sont constituées de la myosine des fibres musculaires, les protéines de transport (hémoglobine…), les protéines de l’immunité (immunoglobulines du petit lait…) et les protéines de stockage comme l’ovalbumine de l’œuf.
Selon leur fonction, on distingue les protéines de structure des protéines à activité biologique des protéines alimentaires
- Les protéines de structure: Elles sont nombreuses et essentielles si vous voulez vous tenir debout et le rester longtemps. Il s’agit par exemple du collagène, de la kératine ou de l’élastine. Elles sont présentes dans la majorité de vos tissus: peau, organes, muscles, os, membranes cellulaires, organelles cellulaires. Ce sont des protéines fibreuses le plus souvent.
- Les protéines à activité biologique: Quels que soit les processus biologiques qui se déroulent dans votre organisme, les protéines seront impliqués d’une manière ou d’une autre. Il peut s’agir d’enzymes, des hormones peptidiques comme l’insuline ou l’hormone de croissance, des protéines contractiles comme l’actine, la myosine et la titine. Il peut s’agir de protéines de transport présentes dans le sang comme l’hémoglobine. Il peut s’agir aussi des protéines du système immunitaires qui constituent nos globules blancs et autres systèmes de défense (anticorps, immunoglobulines…). Certaines protéines sont impliquées dans l’identification cellulaire et bien d’autres encore.
- Les protéines alimentaires: La plupart sont des protéines structurelles (fibres musculaires) ou actives biologiquement. Elles sont digestibles et non toxiques. Elles permettent de satisfaire à nos besoins quotidiens en acides aminés. Les protéines en poudre distribuées dans le commerce sont constitués à partir des protéines alimentaires.
Les acides aminés et les peptides qui viennent avant la protéine
Par définition, un acide aminé se dit d’une molécule organique basée sur un squelette carboné avec deux fonctions: une fonction amine NH2 ou NH3 et une fonction acide (un groupe carboxylique: COOH). Ce sont les plus petites unités composant les protéines. Attention, la proline et l’hydroxyproline ne répondent pas à cette définition. On distingue ensuite les acides aminés qui entrent dans la composition des protéines (les alpha-aminoacides) et les autres acides aminés présents dans la nature mais qui ne font pas partie de la composition des protéines. Cependant, certains de ces acides aminés sont des intermédiaires de notre métabolisme ou des médiateurs chimiques (ornithine, citrulline, bêta-alanine, acides alpha et gamma aminobutyriques, thyroxine, bétaïne, chloramphénicol, etc.). Ainsi, les acides aminés bêta ont d’autres fonctions mais ils n’interviennent pas sur la constitution structurelle propre des protéines.
Dans la nature, on dénombre environ 100 à 150 acides aminés mais seuls 20 d’entre eux sont présents dans le code génétique animal et dans notre génome. Au niveau cellulaire, les acides aminés peuvent se retrouver sous forme libre ou regroupés en peptides et en protéine. Les acides aminés participent alors à la construction des protéines, étant eux-mêmes constituants et précurseurs de protéines, un peu comme les briques forment un mur, le mur est constitué de briques alors que des briques élémentaires peuvent rester à l’état libre pour former d’autres murs. Les acides aminés imbriqués entre eux forment la structure de base des protéines (primaire, secondaire, tertiaire…). Si le nombre d’acides aminés liés entre eux est inférieur à 100, on parle de peptides, plus de 100, on parle de polypeptides.
La chiralité, un aspect important des acides aminés
D’un point de vue de la structure des acides aminés, on note que l’atome central de carbone est relié à 4 groupes différents. On a donc pour chaque molécule, deux constructions identiques au niveau de leurs liaisons peptidiques mais elles ne se superposent pas, elles sont comme des images l’une de l’autre. Ici, on parle de chiralité, notées D et L suivant l’orientation des groupements autour de l’atome central asymétrique. On va donc écrire L-Arginine ou D-Ribose (qui fait partie de la famille des oses comme le dextrose, fructose… ce n’est donc pas un acide aminé). Je donne souvent cet exemple puisque généralement seuls les acides aminés lévogyres (L-) sont actifs dans le corps humain, les dextrogyres, sauf exceptions comme l’acide aspartique par exemple, n’ont pas d’activité biologique mais ils peuvent assurer certaines fonctions spécifiques.
Certains acides aminés sont indispensables à l’être humain, d’autres ne le sont pas parce qu’ils peuvent être fabriqués par le corps en cas de besoin. Cette catégorisation en acides aminés essentiels et non-essentiels reste cependant assez variable et peu pertinente sur le plan physiologique étant donné la permutation permanente des AA entre-eux par voie enzymatique. Sous certaines conditions, certains le seraient ou non, en fonction du contexte métabolique. Essentiels, conditionnellement ou non-essentiels, cette notion reste assez primaire, caduque et réductrice dans l’ensemble. Le code génétique humain est donc à même de synthétiser 20 acides aminés tels que: l’alanine, l’arginine, l’asparagine, l’acide aspartique, la cystéine, l’acide glutamique, la glutamine, la glycine, l’histidine, l’isoleucine, la leucine, la lysine, la méthionine, la phénylalanine, la proline, la sérine, la thréonine, le tryptophane, la tyrosine et la valine.
Les peptides, les assemblages d’acides aminé vers la protéine
Un peptide est une chaîne de 50 acides aminés au moins. ces derniers sont attachés par des liaisons chimiques appelées liaisons peptidiques. En gros, un peptide est une « petite protéine » naissant d’une composition ordonnée par le code génétique. Il existe une quantité phénoménale de peptides composés à partir des 20 acides aminés de base, leur nombre est incalculable puisqu’il existe plusieurs centaines de milliers de milliards de combinaisons possibles.
On distingue les oligopeptides, ce sont les peptides les plus petits. Ils sont composés d’une dizaine d’acides aminés au maximum (dipeptides, tripeptides…). Viennent ensuite les polypeptides qui comportent généralement plus de 100 acides aminés. Leur poids moléculaire avoisine les 10000 Daltons.
Les polypeptides sont formés de plusieurs peptides, avant les protéines
On distingue ensuite les polypeptides, qui sont des ensemble de peptides, des protéines, ensemble de plusieurs polypeptides, des oligopeptides, qui sont de minuscules peptides de 10 acides aminés au plus. On parle ensuite de dipeptides (2 acides aminés), de tripeptides (3 acides aminés), de tétrapeptides (4 acides aminés), de pentapeptides (5 acides aminés), d’octapeptides (8 acides aminés), de nonapeptides (9 acides aminés), et de décapeptides (10 acides aminés). On distingue enfin les neuropeptides créés par un neurone et dont la fonction est celle d’un neurotransmetteur.
Et voilà pour cette brève présentation des protéines, acides aminés et peptides… Je conçois que ce genre d’article est un peu fatiguant mais le second sera plus passionnant, je reviendrais sur l’origine supposée des acides aminés et donc, de la vie elle-même. Mais d’ici là, n’oubliez pas de développer votre culture physique ! Pensez également à vous abonner à la newsletter afin de vous tenir au courant de la sortie des nouveaux articles.
La mise à jour de cet article a été effectuée avec l’aimable autorisation de Monsieur El Atyqy, ingénieur en biochimie alimentaire.
Eric Mallet
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