J’ai pu enfin prendre un peu de temps pour traduire la suite des articles « Intermittent Thoughts on Building Muscle » du blog SuppVersity dont je vous recommande fortement la lecture si vous lisez l’anglais. A nouveau, je vous rappelle que mon blog Espace Corps Esprit Forme ne fait pas la promotion de substances pharmaceutiques détournées de leur usage thérapeutique et que ces articles ne sont traduits qu’à titre d’information. Je vous recommande d’ailleurs tout particulièrement de bien retenir ce qui expliqué ici par Adel Moussa. Je me suis servi en partie des informations données par cet article pour développer la formule de Virilis V2 pour Yam Nutrition afin de créer un complément « testostérone » qui vous serve vraiment à quelque chose. J’aurais l’occasion d’en reparler par la suite. Quant aux autres articles de cette série, ils sont disponibles sur le blog. Il vous suffit d’utiliser l’onglet de recherche en bas à gauche – avec les mots clé « comprendre la croissance musculaire » pour les lire.
Eric Mallet
Image 1: Résumé graphique des fonctions probablement les mieux connues de la testostérone…
Dans les deux derniers épisodes des articles « Comprendre la Croissance Musculaire », j’ai essayé de vous donner une perception réaliste de ce que sont exactement les effets des niveaux physiologiques supra (c’est-à-dire ci-dessous) et super (c’est-à-dire au-dessus) (c’est-à-dire qu’ils sont considérés comme « normaux » en ce sens qu’ils représentent la « moyenne » pour les hommes) de testostérone sur la composition du corps humain. Avec ce nouvel article de la série, je vais maintenant vous fournir plus d’informations sur les fondements moléculaires « exacts » par lesquels la testostérone agit sur la construction musculaire et la « magie » de la combustion des graisses.
Une chose est cependant liée aux données que j’ai présentées dans les articles précédents; je tiens à le souligner une fois de plus : L’utilisation d’un énanthate de testostérone dans l’étude de Bhasin rend très difficile l’utilisation des données à des fins de pronostics concernant les résultats que vous pourriez constater lorsque vous utilisez des suppléments naturels (ou non-naturels) pour augmenter la production endogène (celle de vos testicules) de testostérone. Et bien qu’il y ait certainement des douzaines de facteurs qui empêcheraient les déductions respectives, je n’aborderai que trois facteurs car je pense qu’il s’agit des plus importants.
Ici, il y a trois choses à retenir, lorsque vous interprétez les données provenant du dernier article:
- Avec l’énanthate de testostérone ayant une demi-vie d’environ 4-5 jours, les taux de testostérone, qui, dans l’étude de Bhasin, ont été mesurés le 7e jour après l’injection, ne représentent que <50% du reste des taux de testostérone que nous verrions dans les 24 heures après injection.
Tableau 1: Taux hypothétiques de testostérone sérique présentés au cours des sept premiers jours suivant l’injection de testostérone endogène (bleu) par rapport au rythme diurne régulier (vert) et les taux en réponse à un booster naturel assez puissant (+70%) de testostérone (rouge ; toutes les données ont une valeur indicative, seulement)
Bien que les données du tableau 1 ne soient évidemment pas basées sur des données expérimentales « réelles », j’espère qu’en jetant un bref coup d’œil sur les ratios des aires sous la courbe du taux normal de testostérone présentant une variation journalière de +- 40% (en vert), de l’augmentation maximale de + 70% du taux de testostérone donnée par un « booster » (en rouge) et d’une injection d’énanthate de testostérone (en bleu), que chacun d’entre vous comprendra que les effets de « construction musculaire / combustion des graisses » d’une augmentation de +70 % de la testostérone, quel que soit le produit en vente libre que vous prenez, peuvent difficilement se comparer à la testostérone injectable.
La SHBG
2. Un autre aspect à prendre en compte est l’absence de réponse à la Sex Hormone Binding Globuline (SHBG ou Globuline de Liaison aux Hormones Sexuelles en français) dans l’étude de Bhasin, ce qui explique que les augmentations relatives de la testostérone liée et libre (= non liée et prétendument « active ») étaient identiques. Cela peut être le cas, mais ne doit pas nécessairement l’être lorsque vous augmentez votre taux de testostérone « naturellement ». En cela, l’aromatisation de la testostérone en œstrogènes apparaît comme l’un des corrélats majeurs (je ne parle pas délibérément de « causalité » dans ce contexte) des augmentations de la SHBG. Dans le pire des cas, vous pourriez ainsi « booster » votre testostérone totale et vous retrouver avec moins de testostérone libre en raison d’une augmentation (possiblement induite par les œstrogènes/apparentée) de la SHBG. Cela étant dit, il existe aussi de nombreux cas où c’est exactement le contraire. Les hommes particulièrement maigres (mais encore musclés) ont tendance à avoir un faible taux de SHBG, de sorte qu’en dépit d’un taux de testostérone total « bas à normal », beaucoup d’entre eux ont un taux de testostérone libre normal, élevé ou même très élevé.
3. Le dernier facteur qui rend discutable une comparaison quantitative directe des effets des taux élevés de testostérone « naturelle » et « artificielle » est pour le moins l’absence du rythme diurne naturel avec l’administration exogène de testostérone. En 24 heures, les taux de testostérone fluctuent de +/- 40% avec un pic le matin (vers 6-7h) et un creux en début de soirée. Contrairement aux taux de testostérone « artificiellement améliorés », ceux qui figurent sur l’imprimé de votre laboratoire représentent donc soit le maximum quotidien (si le sang a été prélevé tôt le matin), une moyenne (sang prélevé vers midi) ou le point le plus bas (sang prélevé le soir) de votre taux de testostérone sur 24h.
- En passant, imaginez que vous vouliez vendre un « booster de testostérone naturel ». Quelle serait la meilleure façon d’obtenir une augmentation « cliniquement prouvée » de la testostérone ? Il vous suffirait de faire tester vos sujets « à l’étude » le soir pour obtenir les niveaux de base et le matin pour obtenir les niveaux post-interventionnels et *bang* vous avez obtenu votre augmentation « cliniquement prouvée » de +40% en testostérone ;-)
Et même si vous parvenez (par quelque moyen que ce soit) à élever « naturellement » votre taux de testostérone à un niveau de +200% de votre « moyenne » , le mécanisme naturel de rétroaction négative (inhibition de la libération de l’hormone lutéinisante (LH)) mettra bientôt fin à cette poussée de testostérone.
Tout cela ne change rien à l’observation que nous avons fait dans le premier volet de cette série (jusqu’à présent) en trois parties sur les effets de la testostérone sur l’hypertrophie de muscles squelettiques : La testostérone renforce les muscles ! Les processus physiologiques sous-jacents sur la croissance musculaire ne sont toutefois pas entièrement élucidés. Le bref résumé que j’ai rassemblé dans les paragraphes suivants est donc un « travail en cours », non seulement parce que j’essaie encore de comprendre « comment fonctionne la testostérone », mais aussi parce que l’interaction complexe entre les hormones, les cascades de signalisation des protéines et des acteurs clés du système immunitaire n’ont pas encore été complètement élucidées. Note EM: Et incidemment, comprendre la croissance musculaire reste un challenge que nous n’avons pas encore résolu en totalité.
Les effets directs de la testostérone sur les cellules et la croissance musculaire
Je ne sais pas si vous avez déjà entendu le nom « Vida », sinon, vous n’avez probablement pas plongé dans la profondeur de la stéroïdologie bro-scientifique. Le livre de Julius A. Vida Androgens and Anabolic Agents a été publié en 1969. Certaines personnes appellent ce livre la « bible des stéroïdes ». Il contient des informations sur la structure et l’activité biologique de 666 stéroïdes différents.
Tableau 2: Scan de l’ouvrage de Vida présentant l’activité androgénique et anabolisante de la 19-Nortestostérone (Nandrolone ou DECA) à partir d’un modèle de rongeur.
Ce dernier point présentant un intérêt particulier pour les producteurs et les consommateurs de stéroïdes et de prohormones, les scans des tableaux qui constituent une bonne partie du livre original peuvent être consultés partout sur Internet (cf. Tableau 2). Vida a obtenu les données des études sur les rongeurs et a estimé l’effet « anabolisant » des molécules testées sur la base de la réponse hypertrophique du muscle levator ani de ses animaux de laboratoire. Maintenant, vous pouvez vous demander à juste titre, comment cela se rapporte à notre sujet… La raison pour laquelle Vida (et la plupart des autres chercheurs) a choisi le muscle levator ani comme référence est sa grande réactivité aux androgènes car il présente une densité beaucoup plus grande de récepteurs aux androgènes que la plupart des muscles squelettiques que vous essayez probablement de construire, quand vous êtes en salle de musculation (et je suppose que vous ne travaillez pas l’ani levator, non plus ?)
Image 2: Le muscle levator ani est particulièrement sujet à l’hypertrophie induite par les androgènes, car il possède une quantité particulièrement élevée de récepteurs aux androgènes. Que vous le sachiez ou non, dans 99% des cas, l’activité anabolisante d’un « stéroïde designer » donné est généralement fourni par rapport à la réponse à l’hypertrophie induite par la testostérone pour ce muscle.
Il est intéressant de noter que les zones du muscle où l’expression des récepteurs androgéniques est la plus élevée sont les myonuclei (noyaux) et les cellules satellites. Vous les connaissez tous les deux grâce aux précédents articles de cette série et vous vous souviendrez certainement que le recrutement de nouveaux myonuclei à partir de cellules satellites était une condition préalable nécessaire à une croissance musculaire continue car avec l’augmentation constante de la taille des domaines myonucléaires (Note EM: Globalement le volume cellulaire du cytoplasme disponible par noyau), le muscle finirait par devenir dysfonctionnel (voir « Dépasser temporairement les limites physiologiques« ). Il est donc probable qu’à côté de l’IGF-1, la testostérone fournisse un second stimulus de croissance secondaire ou complémentaire aux cellules satellites qui seraient autrement en repos.
Du fait que les sujets de l’étude de Bhasin ont présenté une réponse hypertrophique marquée en l’absence de stimuli d’entraînement adéquats, nous pouvons également conclure que l’action de la testostérone, contrairement aux variantes d’épissage de l’IGF-1 exprimées localement (cf. MGF & Co), ne dépend (au moins dans une certaine mesure) pas des lésions musculaires/entraînement de la force. Les résultats d’une étude menée en 2005 par le Human Performance Laboratory de l’Université du Connecticut (Kraemer. 2005), qui a constaté une réduction de -46% de l’expression des récepteurs aux androgènes en réponse à un volume d’entraînement suggère même que la testostérone occupe une place secondaire lorsque la voie MGF opère son travail de renforcement musculaire.
La question de savoir si ce dernier, c’est-à-dire le travail de la testostérone dans la construction musculaire est identique à celui de l’IGF-1 et de ses variantes d’épissage est discutable de toute façon. Après tout, les expériences avec des cellules satellites bovines isolées ont montré qu’une incubation avec de la trenbolone androgénique synthétique entraînait une augmentation de la synthèse protéique en fonction de la dose et une diminution de la dégradation des protéines (Kamango-Sollo, 2011). La fonction de la testostérone pourrait donc être de maintenir les myoblastes (= cellules progénitrices) dans un état de prolifération – ou, plus simplement, la testostérone maintient les cellules satellites actives et prêtes à être incorporées dans le muscle, lorsque cela devient nécessaire.
Note EM: Ce que ne précise pas Adel Moussa (et qu’il faut préciser ici), c’est que l’hypertrophie et la synthèse des protéines dépend directement du nombre de noyaux cellulaires. En toute logique, c’est bien le nombre de noyaux qui détermine la quantité d’ADN disponible à opérer vers la translation du brin d’ARN correspondant à la traduction nécessaire à la synthèse des protéines. Ceci nous éclaire donc très simplement sur ce qui vient d’être dit plus haut. Autrement dit, au moins vous avez de cellules satellites actives, au moins vous aurez de noyaux et au moins la synthèse protéique sera active. On en revient précisément à la définition du domaine nucléaire, la relation existant entre la taille de la fibre et le nombre de noyaux. Et donc, si la testostérone préserve l’activité des cellules satellites (pour incorporation de nouveaux noyaux), elle augmente aussi indirectement la capacité du muscle à activer plus fortement la synthèse protéique.
La testostérone convertit la graisse potentielle en muscle par l’augmentation des besoins en énergie
Malgré le fait que les effets de la testostérone sur le développement musculaire sont au cœur de cette série, je suppose que vous avez été tout aussi impressionné par l’effet de l’administration de doses graduées d’énanthate de testostérone sur les taux de graisse corporelle des sujets de l’étude de Bhasin. Une explication possible pour cet effet sur la croissance musculaire serait certainement en rapport à l’augmentation des besoins énergétiques de la masse musculaire squelettique supplémentaire. A lui seul, cela peut cependant difficilement expliquer la profondeur des effets observés par Bhasin et al. dans les groupes énanthate de testostérone à faible et très faible dose.
Tableau 3: Changement relatif de la masse maigre et de la masse grasse en réponse aux changements des taux sériques de testostérone. La zone verte indique des taux « normaux » = taux physiologiques de testostérone. Les astérisques (*) indiquent des changements statistiquement significatifs (p < 0,05) en fonction des valeurs de référence (calculées à partir de Bhasin, 2001)
Je veux dire, si vous examinez attentivement les données, même les groupes à faible dose ont effectivement stimulé la croissance musculaire (< 2 % et statistiquement non significative). Une perte de masse musculaire squelettique ne peut donc expliquer l’augmentation de 18 à 37% de la masse graisseuse (cf. figure 3). Dans une publication ultérieure, Bhasin et al. proposent donc une explication alternative – je dirais tout à fait excitante – pour cette observation et d’autres observations similaires chez les hommes hypogonadiques (Bhasin. 2004) :
- Le changement réciproque de la masse maigre et de la masse grasse induite par les androgènes s’explique mieux par l’hypothèse que les androgènes favorisent l’engagement des cellules pluripotentes mésenchymateuses dans la lignée myogénique et inhibent l’adipogenèse par une voie médiée par les récepteurs androgéniques. {Note EM: ! :-)
Cet effet d’amorçage de la testostérone sur les cellules souches « universelles » du tissu conjonctif ne se traduirait pas seulement par une augmentation du nombre de cellules souches appelées à devenir des cellules musculaires (autrement dit des cellules satellites), la testostérone réduirait également le nombre de « futurs adipocytes » et inhiberait ainsi la formation et le renouvellement des cellules graisseuses apoptotiques, c’est-à-dire mortes. Cette hypothèse est corroborée par les découvertes récentes de Semirale et al. qui constatent une réduction de l’accumulation de graisse viscérale et sous-cutanée avec une augmentation réciproque de la masse maigre chez les souris mâles et surexpression ciblée des récepteurs androgènes dans les cellules souches mésenchymateuses (Semirale, 2011).
Le rôle de la testostérone sur la connexion nerfs/muscles
Son effet sur les cellules musculaires proprement dites et leurs progéniteurs mis à part, la testostérone se lie également aux récepteurs androgéniques des motoneurones qui innervent le muscle. Il est intéressant de noter que la mort de ces motoneurones est considérée comme la cause principale de la sarcopénie et de la diminution associée de la masse musculaire au cours du processus de vieillissement (Narici. 2008). Le traitement direct des motoneurones avec différentes doses de testostérone entraîne une augmentation de la taille et du nombre de motoneurones (Fraley. 2002 ; Mansouri. 2003). L’équivalent physiologique de ce dernier peut donc bien être responsable de l’amélioration de la « connexion esprit-muscle » que les utilisateurs de substances améliorant la performance signalent fréquemment. Elle peut également faciliter une activation plus grande/optimisée des fibres musculaires existantes et pourrait ainsi contribuer à des gains de force qui ne dépendraient pas de la croissance musculaire précédente. L’augmentation de la force, à son tour, permettrait aux athlètes de soulever des poids plus lourds et de fournir un nouveau stimulus de croissance, et ainsi de suite…
Chaque fois qu’il est question d’androgènes et de la « connexion esprit-muscle », quelqu’un mentionne habituellement les trois lettres D, H et T et invoque ainsi le rôle de l’androgène le plus puissant, la dihydrotestostérone, pour laquelle la « Big T » n’est qu’une prohormone. Que ce soit vraiment la DHT, une combinaison des deux, ou si l’un des deux est juste plus puissant dans l’induction de ces effets neuronaux liés aux androgènes, cette question constituera le sujet du prochain volet de cette série, dans lequel la DHT et les œstrogènes complètent un portrait encore très sommaire du rôle complexe des « hormones sexuelles » dans une orchestration si dense que l’idée qu’une seule hormone, protéine, acide aminé ou cytokine inflammatoire puisse faire croître votre muscle est simplement ridicule – même si cette hormone est bien la « The Big T » ;-)
Article source: Intermittent Thoughts on Building Muscle: Understanding the « Big T » – Testosterone Programs Stem Cells to Become Muscle note Fat + Keeps Satellite Cells & Motoneurons Alive
Comprendre la Croissance Musculaire: Comprendre la « Big T » ou comment la Testostérone programme les cellules souches à devenir des cellules musculaires…
12 - 07
2019
J’ai pu enfin prendre un peu de temps pour traduire la suite des articles « Intermittent Thoughts on Building Muscle » du blog SuppVersity dont je vous recommande fortement la lecture si vous lisez l’anglais. A nouveau, je vous rappelle que mon blog Espace Corps Esprit Forme ne fait pas la promotion de substances pharmaceutiques détournées de leur usage thérapeutique et que ces articles ne sont traduits qu’à titre d’information. Je vous recommande d’ailleurs tout particulièrement de bien retenir ce qui expliqué ici par Adel Moussa. Je me suis servi en partie des informations données par cet article pour développer la formule de Virilis V2 pour Yam Nutrition afin de créer un complément « testostérone » qui vous serve vraiment à quelque chose. J’aurais l’occasion d’en reparler par la suite. Quant aux autres articles de cette série, ils sont disponibles sur le blog. Il vous suffit d’utiliser l’onglet de recherche en bas à gauche – avec les mots clé « comprendre la croissance musculaire » pour les lire.
Eric Mallet
Image 1: Résumé graphique des fonctions probablement les mieux connues de la testostérone…
Dans les deux derniers épisodes des articles « Comprendre la Croissance Musculaire », j’ai essayé de vous donner une perception réaliste de ce que sont exactement les effets des niveaux physiologiques supra (c’est-à-dire ci-dessous) et super (c’est-à-dire au-dessus) (c’est-à-dire qu’ils sont considérés comme « normaux » en ce sens qu’ils représentent la « moyenne » pour les hommes) de testostérone sur la composition du corps humain. Avec ce nouvel article de la série, je vais maintenant vous fournir plus d’informations sur les fondements moléculaires « exacts » par lesquels la testostérone agit sur la construction musculaire et la « magie » de la combustion des graisses.
Une chose est cependant liée aux données que j’ai présentées dans les articles précédents; je tiens à le souligner une fois de plus : L’utilisation d’un énanthate de testostérone dans l’étude de Bhasin rend très difficile l’utilisation des données à des fins de pronostics concernant les résultats que vous pourriez constater lorsque vous utilisez des suppléments naturels (ou non-naturels) pour augmenter la production endogène (celle de vos testicules) de testostérone. Et bien qu’il y ait certainement des douzaines de facteurs qui empêcheraient les déductions respectives, je n’aborderai que trois facteurs car je pense qu’il s’agit des plus importants.
Ici, il y a trois choses à retenir, lorsque vous interprétez les données provenant du dernier article:
Tableau 1: Taux hypothétiques de testostérone sérique présentés au cours des sept premiers jours suivant l’injection de testostérone endogène (bleu) par rapport au rythme diurne régulier (vert) et les taux en réponse à un booster naturel assez puissant (+70%) de testostérone (rouge ; toutes les données ont une valeur indicative, seulement)
Bien que les données du tableau 1 ne soient évidemment pas basées sur des données expérimentales « réelles », j’espère qu’en jetant un bref coup d’œil sur les ratios des aires sous la courbe du taux normal de testostérone présentant une variation journalière de +- 40% (en vert), de l’augmentation maximale de + 70% du taux de testostérone donnée par un « booster » (en rouge) et d’une injection d’énanthate de testostérone (en bleu), que chacun d’entre vous comprendra que les effets de « construction musculaire / combustion des graisses » d’une augmentation de +70 % de la testostérone, quel que soit le produit en vente libre que vous prenez, peuvent difficilement se comparer à la testostérone injectable.
La SHBG
2. Un autre aspect à prendre en compte est l’absence de réponse à la Sex Hormone Binding Globuline (SHBG ou Globuline de Liaison aux Hormones Sexuelles en français) dans l’étude de Bhasin, ce qui explique que les augmentations relatives de la testostérone liée et libre (= non liée et prétendument « active ») étaient identiques. Cela peut être le cas, mais ne doit pas nécessairement l’être lorsque vous augmentez votre taux de testostérone « naturellement ». En cela, l’aromatisation de la testostérone en œstrogènes apparaît comme l’un des corrélats majeurs (je ne parle pas délibérément de « causalité » dans ce contexte) des augmentations de la SHBG. Dans le pire des cas, vous pourriez ainsi « booster » votre testostérone totale et vous retrouver avec moins de testostérone libre en raison d’une augmentation (possiblement induite par les œstrogènes/apparentée) de la SHBG. Cela étant dit, il existe aussi de nombreux cas où c’est exactement le contraire. Les hommes particulièrement maigres (mais encore musclés) ont tendance à avoir un faible taux de SHBG, de sorte qu’en dépit d’un taux de testostérone total « bas à normal », beaucoup d’entre eux ont un taux de testostérone libre normal, élevé ou même très élevé.
3. Le dernier facteur qui rend discutable une comparaison quantitative directe des effets des taux élevés de testostérone « naturelle » et « artificielle » est pour le moins l’absence du rythme diurne naturel avec l’administration exogène de testostérone. En 24 heures, les taux de testostérone fluctuent de +/- 40% avec un pic le matin (vers 6-7h) et un creux en début de soirée. Contrairement aux taux de testostérone « artificiellement améliorés », ceux qui figurent sur l’imprimé de votre laboratoire représentent donc soit le maximum quotidien (si le sang a été prélevé tôt le matin), une moyenne (sang prélevé vers midi) ou le point le plus bas (sang prélevé le soir) de votre taux de testostérone sur 24h.
Et même si vous parvenez (par quelque moyen que ce soit) à élever « naturellement » votre taux de testostérone à un niveau de +200% de votre « moyenne » , le mécanisme naturel de rétroaction négative (inhibition de la libération de l’hormone lutéinisante (LH)) mettra bientôt fin à cette poussée de testostérone.
Tout cela ne change rien à l’observation que nous avons fait dans le premier volet de cette série (jusqu’à présent) en trois parties sur les effets de la testostérone sur l’hypertrophie de muscles squelettiques : La testostérone renforce les muscles ! Les processus physiologiques sous-jacents sur la croissance musculaire ne sont toutefois pas entièrement élucidés. Le bref résumé que j’ai rassemblé dans les paragraphes suivants est donc un « travail en cours », non seulement parce que j’essaie encore de comprendre « comment fonctionne la testostérone », mais aussi parce que l’interaction complexe entre les hormones, les cascades de signalisation des protéines et des acteurs clés du système immunitaire n’ont pas encore été complètement élucidées. Note EM: Et incidemment, comprendre la croissance musculaire reste un challenge que nous n’avons pas encore résolu en totalité.
Les effets directs de la testostérone sur les cellules et la croissance musculaire
Je ne sais pas si vous avez déjà entendu le nom « Vida », sinon, vous n’avez probablement pas plongé dans la profondeur de la stéroïdologie bro-scientifique. Le livre de Julius A. Vida Androgens and Anabolic Agents a été publié en 1969. Certaines personnes appellent ce livre la « bible des stéroïdes ». Il contient des informations sur la structure et l’activité biologique de 666 stéroïdes différents.
Tableau 2: Scan de l’ouvrage de Vida présentant l’activité androgénique et anabolisante de la 19-Nortestostérone (Nandrolone ou DECA) à partir d’un modèle de rongeur.
Ce dernier point présentant un intérêt particulier pour les producteurs et les consommateurs de stéroïdes et de prohormones, les scans des tableaux qui constituent une bonne partie du livre original peuvent être consultés partout sur Internet (cf. Tableau 2). Vida a obtenu les données des études sur les rongeurs et a estimé l’effet « anabolisant » des molécules testées sur la base de la réponse hypertrophique du muscle levator ani de ses animaux de laboratoire. Maintenant, vous pouvez vous demander à juste titre, comment cela se rapporte à notre sujet… La raison pour laquelle Vida (et la plupart des autres chercheurs) a choisi le muscle levator ani comme référence est sa grande réactivité aux androgènes car il présente une densité beaucoup plus grande de récepteurs aux androgènes que la plupart des muscles squelettiques que vous essayez probablement de construire, quand vous êtes en salle de musculation (et je suppose que vous ne travaillez pas l’ani levator, non plus ?)
Image 2: Le muscle levator ani est particulièrement sujet à l’hypertrophie induite par les androgènes, car il possède une quantité particulièrement élevée de récepteurs aux androgènes. Que vous le sachiez ou non, dans 99% des cas, l’activité anabolisante d’un « stéroïde designer » donné est généralement fourni par rapport à la réponse à l’hypertrophie induite par la testostérone pour ce muscle.
Il est intéressant de noter que les zones du muscle où l’expression des récepteurs androgéniques est la plus élevée sont les myonuclei (noyaux) et les cellules satellites. Vous les connaissez tous les deux grâce aux précédents articles de cette série et vous vous souviendrez certainement que le recrutement de nouveaux myonuclei à partir de cellules satellites était une condition préalable nécessaire à une croissance musculaire continue car avec l’augmentation constante de la taille des domaines myonucléaires (Note EM: Globalement le volume cellulaire du cytoplasme disponible par noyau), le muscle finirait par devenir dysfonctionnel (voir « Dépasser temporairement les limites physiologiques« ). Il est donc probable qu’à côté de l’IGF-1, la testostérone fournisse un second stimulus de croissance secondaire ou complémentaire aux cellules satellites qui seraient autrement en repos.
Du fait que les sujets de l’étude de Bhasin ont présenté une réponse hypertrophique marquée en l’absence de stimuli d’entraînement adéquats, nous pouvons également conclure que l’action de la testostérone, contrairement aux variantes d’épissage de l’IGF-1 exprimées localement (cf. MGF & Co), ne dépend (au moins dans une certaine mesure) pas des lésions musculaires/entraînement de la force. Les résultats d’une étude menée en 2005 par le Human Performance Laboratory de l’Université du Connecticut (Kraemer. 2005), qui a constaté une réduction de -46% de l’expression des récepteurs aux androgènes en réponse à un volume d’entraînement suggère même que la testostérone occupe une place secondaire lorsque la voie MGF opère son travail de renforcement musculaire.
La question de savoir si ce dernier, c’est-à-dire le travail de la testostérone dans la construction musculaire est identique à celui de l’IGF-1 et de ses variantes d’épissage est discutable de toute façon. Après tout, les expériences avec des cellules satellites bovines isolées ont montré qu’une incubation avec de la trenbolone androgénique synthétique entraînait une augmentation de la synthèse protéique en fonction de la dose et une diminution de la dégradation des protéines (Kamango-Sollo, 2011). La fonction de la testostérone pourrait donc être de maintenir les myoblastes (= cellules progénitrices) dans un état de prolifération – ou, plus simplement, la testostérone maintient les cellules satellites actives et prêtes à être incorporées dans le muscle, lorsque cela devient nécessaire.
Note EM: Ce que ne précise pas Adel Moussa (et qu’il faut préciser ici), c’est que l’hypertrophie et la synthèse des protéines dépend directement du nombre de noyaux cellulaires. En toute logique, c’est bien le nombre de noyaux qui détermine la quantité d’ADN disponible à opérer vers la translation du brin d’ARN correspondant à la traduction nécessaire à la synthèse des protéines. Ceci nous éclaire donc très simplement sur ce qui vient d’être dit plus haut. Autrement dit, au moins vous avez de cellules satellites actives, au moins vous aurez de noyaux et au moins la synthèse protéique sera active. On en revient précisément à la définition du domaine nucléaire, la relation existant entre la taille de la fibre et le nombre de noyaux. Et donc, si la testostérone préserve l’activité des cellules satellites (pour incorporation de nouveaux noyaux), elle augmente aussi indirectement la capacité du muscle à activer plus fortement la synthèse protéique.
La testostérone convertit la graisse potentielle en muscle par l’augmentation des besoins en énergie
Malgré le fait que les effets de la testostérone sur le développement musculaire sont au cœur de cette série, je suppose que vous avez été tout aussi impressionné par l’effet de l’administration de doses graduées d’énanthate de testostérone sur les taux de graisse corporelle des sujets de l’étude de Bhasin. Une explication possible pour cet effet sur la croissance musculaire serait certainement en rapport à l’augmentation des besoins énergétiques de la masse musculaire squelettique supplémentaire. A lui seul, cela peut cependant difficilement expliquer la profondeur des effets observés par Bhasin et al. dans les groupes énanthate de testostérone à faible et très faible dose.
Tableau 3: Changement relatif de la masse maigre et de la masse grasse en réponse aux changements des taux sériques de testostérone. La zone verte indique des taux « normaux » = taux physiologiques de testostérone. Les astérisques (*) indiquent des changements statistiquement significatifs (p < 0,05) en fonction des valeurs de référence (calculées à partir de Bhasin, 2001)
Je veux dire, si vous examinez attentivement les données, même les groupes à faible dose ont effectivement stimulé la croissance musculaire (< 2 % et statistiquement non significative). Une perte de masse musculaire squelettique ne peut donc expliquer l’augmentation de 18 à 37% de la masse graisseuse (cf. figure 3). Dans une publication ultérieure, Bhasin et al. proposent donc une explication alternative – je dirais tout à fait excitante – pour cette observation et d’autres observations similaires chez les hommes hypogonadiques (Bhasin. 2004) :
Cet effet d’amorçage de la testostérone sur les cellules souches « universelles » du tissu conjonctif ne se traduirait pas seulement par une augmentation du nombre de cellules souches appelées à devenir des cellules musculaires (autrement dit des cellules satellites), la testostérone réduirait également le nombre de « futurs adipocytes » et inhiberait ainsi la formation et le renouvellement des cellules graisseuses apoptotiques, c’est-à-dire mortes. Cette hypothèse est corroborée par les découvertes récentes de Semirale et al. qui constatent une réduction de l’accumulation de graisse viscérale et sous-cutanée avec une augmentation réciproque de la masse maigre chez les souris mâles et surexpression ciblée des récepteurs androgènes dans les cellules souches mésenchymateuses (Semirale, 2011).
Le rôle de la testostérone sur la connexion nerfs/muscles
Son effet sur les cellules musculaires proprement dites et leurs progéniteurs mis à part, la testostérone se lie également aux récepteurs androgéniques des motoneurones qui innervent le muscle. Il est intéressant de noter que la mort de ces motoneurones est considérée comme la cause principale de la sarcopénie et de la diminution associée de la masse musculaire au cours du processus de vieillissement (Narici. 2008). Le traitement direct des motoneurones avec différentes doses de testostérone entraîne une augmentation de la taille et du nombre de motoneurones (Fraley. 2002 ; Mansouri. 2003). L’équivalent physiologique de ce dernier peut donc bien être responsable de l’amélioration de la « connexion esprit-muscle » que les utilisateurs de substances améliorant la performance signalent fréquemment. Elle peut également faciliter une activation plus grande/optimisée des fibres musculaires existantes et pourrait ainsi contribuer à des gains de force qui ne dépendraient pas de la croissance musculaire précédente. L’augmentation de la force, à son tour, permettrait aux athlètes de soulever des poids plus lourds et de fournir un nouveau stimulus de croissance, et ainsi de suite…
Chaque fois qu’il est question d’androgènes et de la « connexion esprit-muscle », quelqu’un mentionne habituellement les trois lettres D, H et T et invoque ainsi le rôle de l’androgène le plus puissant, la dihydrotestostérone, pour laquelle la « Big T » n’est qu’une prohormone. Que ce soit vraiment la DHT, une combinaison des deux, ou si l’un des deux est juste plus puissant dans l’induction de ces effets neuronaux liés aux androgènes, cette question constituera le sujet du prochain volet de cette série, dans lequel la DHT et les œstrogènes complètent un portrait encore très sommaire du rôle complexe des « hormones sexuelles » dans une orchestration si dense que l’idée qu’une seule hormone, protéine, acide aminé ou cytokine inflammatoire puisse faire croître votre muscle est simplement ridicule – même si cette hormone est bien la « The Big T » ;-)
Article source: Intermittent Thoughts on Building Muscle: Understanding the « Big T » – Testosterone Programs Stem Cells to Become Muscle note Fat + Keeps Satellite Cells & Motoneurons Alive